Un taxi pour Tobrouk

Denys de La Patellière

Libye, 1942. Théo Dumas (Lino Ventura), brigadier des Forces françaises libres, et ses hommes, François Gensac (Maurice Biraud), Samuel Goldmann (Charles Aznavour) et Jean Ramirez (German Cobos), ont pour mission de faire sauter des dépôts d’essence allemands. L’opération est un succès, mais ils doivent fuir dans le désert. Après avoir enlevé un capitaine ennemi, Ludwig von Stegel (Hardy Krüger), le commando tente de regagner sa base.

Après Les Yeux de l’amour (1959), Denys de La Patellière réalise Un taxi pour Tobrouk, plaidoyer sur l’absurdité de la guerre, qui a coûté la vie à plusieurs membres de sa famille.

Tourné dans les paysages âpres de la sierra Alhamilla, au sud de l’Espagne, le film est une savoureuse peinture de caractères, déployant une galerie de personnages fortement typés, toujours plus prompts à parler qu’à se battre. Avec une rare sobriété, La Patellière met en scène la fatigue des corps, la progression lente et pénible, le sable brûlant et les horizons déserts, éclairés par la superbe photographie de Marcel Grignon.

Le film est porté par les dialogues percutants d’Audiard, entre lyrisme et ironie. Lino Ventura, bourru et roublard dans la peau d’un ancien boxeur, accompagne Charles Aznavour, encore tout auréolé du succès du film d’André Cayatte, Le Passage du Rhin (1960). Celui-ci confirme son statut de grand comédien, dans le rôle émouvant d’un médecin juif en fuite.

« Denys de La Patellière a mis en scène Un taxi pour Tobrouk avec cette aisance et cette sobriété qui caractérisent son talent. La tâche n'était pas facile, l'action se déroulant presque entièrement à bord d'une jeep dans le désert. Un montage rapide, de simples mouvements d'appareils, évitent toute impression de longueur et de monotonie. Les comédiens se régalent avec le texte d'Audiard. Lino Ventura marche d'un pas prudent mais ferme sur les traces de Gabin, Hardy Krüger (l'officier allemand), Maurice Biraud, German Cobos, sont excellents. C'est cependant Charles Aznavour qui, une fois encore, m'a paru le meilleur. Son regard triste est irrésistible. » (Jean de Baroncelli, Le Monde, 31 mai 1961)

À sa sortie, le film connaît un grand succès. Avec presque cinq millions de spectateurs, il atteint la troisième place du box-office de l’année et remporte le Grand Prix du cinéma français. La postérité ne démentira pas ce triomphe : Un taxi pour Tobrouk est désormais un classique.