Posté le 13.10.2025
Le cinéma a 130 ans et avec lui un trésor qui a marqué ses origines, qui l'a inventé, les films des frères Lumière. Rien n'est plus moderne que les regards des enfants devant cet outil inconnu : la caméra. Rien n'est plus vivant que tout ce peuple qui bouge spontanément à travers le monde. Avec les films, a été inventée la salle de cinéma. Il est bon de le rappeler tant les Lumière ont fait naître un art complet rue du Premier-Film, cette année rénovée, redevenue telle qu'elle était a l'époque. Et tout cela s'est passé à Lyon. Écoutons alors les paroles des lyonnaises et des lyonnais 130 ans plus tard, devant les photogrammes issus des films Lumière à découvrir à la Galerie de l'Institut !
Film Lumière n°237 - Schlossplatz (Stuttgart)
© Collection Institut Lumière
...dit Gaston, 9 ans, écolier devant les vues instantanées des films en noir et blanc qu’il trouve « méga net ». Il a vu les films Lumière chez lui et à l’école. « J’aime bien L’Arrivée du train en gare de La Ciotat avec le train qui arrive de côté, et L’Arroseur arrosé, ça me fait rire ».
Ce qui frappe avant tout les visiteurs, ce sont les attitudes des êtres humains il y a 130 ans ! Mathieu, étudiant, 22 ans est frappé par la forte présence des « gens qui travaillent et qui se divertissent ». « Ces images font découvrir une société française similaire à celle d'aujourd’hui », répond Rafael, 22 ans, étudiant brésilien.
« Ça me touche. Les gens sont beaux quelques soient leurs statuts sociaux. Et puis il y a quelque chose qui joue avec la caméra, qui dit : Je suis là ! » dit Natacha, électricienne, 53 ans. C’est effectivement tout un peuple mondial qui se dévoile intact, des ouvrières élégantes de la sortie des usines Lumière, aux fumeurs d’opium indochinois, aux rameurs d’une baleinière en gros plan.
« J’éprouve de la curiosité pour ces scènes du quotidien dans tous les endroits du monde, c’est intéressant de voir la vie spontanée », constate Mathieu, avant d’ajouter : « ils allaient en excursion dans les Alpes comme on le fait aujourd’hui, mais avec d’autres techniques ». « On oublie que le voyage était une aventure. L’ouverture sur le monde est frappante. Ça rend les humains du siècle dernier plus proches de nous », remarque Béatrice, 54 ans.
« On voit que les gens n’ont pas l’habitude d’être filmés. Leurs regards caméra traduisent leur curiosité, celle de découvrir le monde du cinéma. Il y a un grand calme provoqué par la présence de cette caméra, instrument tout nouveau, un calme qu’il faudrait pouvoir réapprendre aujourd’hui aux enfants », commente Florence, professeur des écoles, 44 ans. Pour Liv, gérante d’entreprise, 46 ans : « Les gens face à la caméra se mettent en pause, comme s'ils se demandaient ce qui se passe. Il semble dire au filmeur : qu’est-ce tu fais ? L’étonnement est hyper présent devant la caméra ».
« On est vraiment dans le reportage. On a du respect pour toutes ces images. C’est grâce aux Lumière et à leurs opérateurs, si on a nos I-phone aujourd’hui ! » conclut Bernard, retraité, ancien météorologiste qui observe de près chaque détail de la vie spontanée qui surgit des photogrammes.
— Propos recueillis par Virginie Apiou
Ce beau livre de presque 500 pages aurait pu s’intituler : Impression d’un monde naissant, tant il a de correspondances avec le tableau miraculeux de Claude Monet Impression soleil levant. C’est effectivement le monde entier animé que les frères Lumière font découvrir pour la première fois au public, comme le soleil se lève et éclaire soudainement tout. Ce sont « 2 000 vues tournées entre 1895 et 1905 par Louis et Auguste Lumière et les dizaines d’opérateurs qu’ils ont recrutés et formés » note Thierry Frémaux dans un avant-propos qui resitue tout. « C’est nettoyer ses propres yeux de tout ce qui les a, depuis, alimentés, nourris, abîmés parfois, c’est revenir aux sources et à l’intention originelle, dans ce langage inventé d’un canon programmatique de cinquante secondes ».
Dédié « Aux visiteuses et visiteurs de la rue du Premier-Film » et « à la mémoire de Jean-Luc Godard », ce livre dévoile des instantanés créés à partir des photogrammes des vues Lumière. « Une seule, soigneusement choisie parmi 16, défilant dans chacune des cinquante secondes que dure une « vue Lumière ». On ressent pleinement « le vaporeux de l’image », le mouvement pris en plein vol, accompagné par des textes référencés, un chapitrage et des citations blanches sur fond de noir profond. « Les gens qu’on voit dans les films Lumière, ce ne sont pas nos ancêtres, ce ne sont pas nos grands-parents ou nos aïeux. C’est nous. » conclut Agnès Varda. « Le monde Lumière est infini. »
> Sortie le 5 novembre, Institut Lumière / Actes Sud
> En vente en avant-première pendant le festival
à venir
> En 2026, le catalogue augmenté de La Production cinématographique des frères Lumière, éd. Institut Lumière Actes Sud.
> L’édition chez Actes Sud des écrits de Bernard Chardère sur les frères Lumière.
> Le lancement d’une plateforme gratuite, accessible à tous, dédiée aux films Lumière contenant aussi une documentation sur les films.
> Et le DVD Lumière, l’aventure continue, documentaire de Thierry Frémaux
Une projection-spectacle célèbrera l’invention de la salle de cinéma, le 28 décembre 1895. Thierry Frémaux commentera une sélection de films Lumière auxquels une restauration éclatante restitue toute leur réalité. Ce spectacle sera accompagné par la musique du pianiste Didier Martel, mettant en valeur la modernité du cinéma des frères Lumière. Ces films aussi extraordinaires que méconnus seront à découvrir pour une soirée exceptionnelle sur l’immense écran du Grand Rex.
> Vendredi 12 décembre à 20h au Grand Rex,
1, Bd Poissonnière, Paris 2e
à découvrir
Lumière et compagnie de Sarah Moon (1995, 1h32)
Remerciements à Cinétévé pour la Restauration 4K
> Institut Lumière (Villa) lu 13 19h | Institut Lumière (Villa) lu 13 19h15
En présence de Fabienne Servan-Schreiber (Cinétévé)
En présence de Fabienne Servan-Schreiber (Cinétévé)
exposition
EXPOSITION PHOTOGRAPHIQUE
« L’aventure Lumière – Personnages et paysages vus dans les films Lumière »
jusqu’au 4 janvier 2026, à la Galerie Photo de l'Institut Lumière, Lyon 8e