Posté le 17.10.2025
Le réalisateur hongrois de 87 ans, István Szabó considéré comme l'un des plus grands d'Europe de l'Est, est venu raconter sa jeunesse, ses débuts au cinéma, et l'histoire de ses films, liée à celle de son pays.

© Léa Rener
PASSé
A mes débuts, j'ai commencé à faire des films traitant des problèmes de ma génération, ce qui correspondait à un groupe de personnes qui avaient terminé l'université, comme on peut le voir dans Père (1966). Mais ce n'était pas suffisant, car selon moi, les problèmes de mes parents étaient encore plus importants. Il était difficile de parler de cette génération, alors je me suis concentré sur leurs rêves. Progressivement, je suis même remonté jusqu'aux problèmes de mes grands-parents, comme la Première Guerre mondiale ou la monarchie austro-hongroise.
SENTIMENTS
Mon rôle consiste à raconter des histoires, pas de jouer aux instituteurs (rires) ! Si le public y trouve quelque chose de touchant, c'est parfait. Il faut que le spectateur puisse se dire : « Je ne suis pas seul avec mes problèmes : cette personne à l'écran est dans la même situation. » C'est mon objectif : qu'on s'identifie. Au cinéma, le côté émotionnel prévaut. Dans quasiment tous mes films, l'amour et l'amitié prennent une place importante, et me permettent de transmettre mes messages.
REGARD
Aujourd'hui encore, le cinéma est le seul support artistique permettant de nous montrer un visage humain, et surtout, les changements d'expression de ce visage en fonction des émotions. Le gros plan est le seul moyen de capter la lumière du regard chez un comédien. Et ça, au théâtre, on ne peut pas le voir, même en étant au premier rang !
ART ET CENSURE
Depuis que je suis né en 1938, il y a déjà eu six changements de régime en Hongrie. J'ai connu les périodes fascistes, le stalinisme... J'ai pu faire tous les films que je voulais malgré la censure. C'est intéressant, parce qu'à chaque fois que je pensais avoir une confrontation avec le gouvernement, je n'ai pas eu de problème, et parfois, c'était l'inverse. Mon film Père a été interdit après sa première nationale, à cause des images de Staline. J'ai alors décidé d'envoyer le film en compétition au Festival de Moscou. Ils l'ont accepté, j'ai obtenu le Grand Prix, et après ça, j'ai pu le diffuser dans le monde entier !
Propos recueillis par Fanny Bellocq

© Léa Rener