István Szabó, cinéaste politique et poétique
 

Posté le 16.10.2025

Issu de la Nouvelle Vague hongroise des années 60, István Szabó signe un cinéma historique et onirique, porté par l’alliance de l’imaginaire et l’effervescence. 

© Jean-Luc Mège Photography

AUTOBIOGRAPHIE

Né en 1938 en Hongrie, István Szabó sait à seize ans qu’il sera cinéaste. Il réalise son premier film à vingt-cinq. Scénariste, acteur, producteur de dix-huit films entre 1960 et 2020, il construit une œuvre où l’autobiographie n’est jamais loin, comme dans Père. Voici l’enfance, puis la vie de jeune adulte, d’un héros hanté par un père disparu durant le siège de Budapest en 1945. Imaginer le caractère et la vie d’un père absent, alors que dehors des événements tragiques grondent, c’est le choix de Szabó. Avec une grâce vertigineuse, le cinéaste sublime la réalité par des séquences magnifiques d’échappées visuelles et sonores. On se souviendra longtemps de la scène où le héros devenu jeune homme, plonge dans le Danube et nage alors qu’en voix of, on découvre sa pensée aussi intense que ses gestes dans l’eau.

LA GRANDE HISTOIRE

Le nazisme, la Seconde Guerre mondiale, et puis l’ère soviétique ont traversé la Hongrie d’István Szabó. Ces grands mouvements du monde obligent les personnages à faire des choix. Le plus fameux est Mephisto, Oscar du meilleur film étranger. Ou la vie d’un acteur de génie qui sacrifie tout à sa gloire, quitte à se compromettre totalement avec le Troisième Reich. Ce film est le revers de Père. Ici, le héros adulte plonge dans une folie narcissique qui l’éloigne de la réalité, là où le jeune fils de Père, sortait de l’enfance et de sa fantasmagorie pour comprendre peu à peu face à quelle histoire de son pays il se trouve.

© DR
Père (1966)

RÊVE ET RÉALITÉ

La vie telle qu’elle est face à la vie rêvée, cette dimension où l’on s’échappe, c’est le grand thème magnifique du cinéma de Szabó. Il est souvent symbolisé par l’art, le théâtre. Sur scène on affabule, et l’on contrôle étrangement tout, alors que la vie réelle impose ses choix. Pour le jeune héros de Père, l’extérieur est pourtant une scène géante où il imagine, avant de voir le monde tel qu’il est. Pour celui de Mephisto, le théâtre, c’est mieux que la vie. Pour Julia, de Adorable Julia, c’est aussi sur les planches qu’elle vit le mieux. L’histoire, en 1938, de cette actrice anglaise, révèle une réalité autant fantastique que cruelle. Julia, femme mûre, qui vit une passion avec un homme plus jeune et pas tout à fait désintéressé, c’est la découverte du monde à tous les âges. Comme l’enfant de Père, comme le comédien de Mephisto, Julia est l’héroïne d’un univers de conte, où l’imaginaire aide à accepter la réalité. C’est tout le génie d'István Szabó !

Virginie Apiou

Master class
Rencontre avec István Szabó
Jeudi 16 octobre à 11h au Pathé Bellecour

La programmation

Mephisto d'István Szabó (1981, 2h25)
Comœdia ve 17 11h15

Adorable Julia d'István Szabó (Being Julia, 2004, 1h45) 
Lumière Terreaux je 16 19h15