Invité d'honneur

John Woo, so french
 


Posté le 19.10.2025


 

Depuis ses débuts - en 1974 - le cinéaste hongkongais s’est distingué par sa capacité à transformer un gunfight en une expérience poétique. 

 

WOO,-John--actu
© DR

 

Pierre angulaire de la nouvelle vague hongkongaise, John Woo (1946), né en Chine, commence par réaliser des films de kung-fu à la chaîne à partir de 1974 - Il a dirigé Jackie Chan dans sa première apparition à l’écran dans Hand Of Death - avant de stabiliser son esthétique unique autour de deux films : Le Syndicat du crime (1986) et surtout The Killer (1989) qui allie intériorité, dilemmes éthiques et virtuosité balistique, au point de faire tomber à genoux des « illuminés » comme lui, dont Martin Scorsese, Oliver Stone et Quentin Tarantino, premiers à avoir dit leur admiration ; bluffés par la manière dont Woo élève les codes du polar vers l’universel, en les agrémentant d’une touche sensible. 

Cinéphile avant de devenir cinéaste, Woo, comme Scorsese, a été biberonné au cinéma d’avant-guerre et pas seulement. Parmi ses films de chevet, Le Samouraï de Jean-Pierre Melville et Les Demoiselle de Rochefort de Jacques Demy. Jamais il ne manque de dire le lien affectif qu’il entretient avec ces classiques : « J’ai toujours pensé avoir beaucoup de points communs avec Jean-Pierre Melville. C’est un tigre silencieux, un romantique désespéré. Pour lui, les idées de justice et d’amitié passent plus haut que tout le reste. Ses personnages m’ont aidé à traverser bien des épreuves. C’est un maître ». Pour Woo, Melville « comprenait la philosophie chinoise plus que certains de nos propres cinéastes… Ses personnages doivent respecter un code d’honneur qui rappelle la chevalerie ». Cette mélancolie - réelle - de Woo pour les valeurs ancestrales chinoises se traduit par la droiture dont ses héros solitaires font preuve dans leur quête rédemptrice, même lorsqu’ils se sentent poursuivis par leurs démons et la fatalité. Le cas bien sûr du personnage central de The Killer, inspiré par le Jeff Costello du Samouraï.

 

KILLER
© DR
The Killer (1994)

 

La parenté avec Demy, plus discrète, se retrouve dans l’attention que porte Woo à la musicalité des mouvements, à la stylisation des cadres urbains et au traitement du sentiment amoureux. Woo revient souvent sur l’influence qu’ont eu sur lui la mélancolie et de l’élégance visuelle de Jacquot de Nantes : « les films de Jacques Demy montrent que l’on peut allier la beauté et la tristesse dans le même plan ».

Ce dialogue subtil avec le cinéma français baigne d’une aura singulière la majorité de ses grands films. L’action chez Woo allie toujours tension morale et raffinement de la mise en scène. Ses blockbusters ne sont pas interchangeables. Même en réalisant le deuxième volet de Mission : Impossible, John Woo parvient à faire du… John Woo, tant le geste et le regard restent le centre de gravité émotionnelle de l’intrigue, derrière l’action pure. L’invitation à Lyon du réalisateur de Volte/face vaut ainsi hommage à ce cinéma virevoltant, si riche, que John Woo alimente de ce « sentiment tragique de la vie » dont parlait le philosophe Miguel de Unamuno. Mais aussi d’un sens aigu de l’héroïsme, lorsqu’il dit : « une balle peut parfois signifier une seconde chance. Ou bien la fin de tout ». 

 

Carlos Gomez

 

 

Master class
Une rencontre exceptionnelle avec John Woo
Dimanche 19 octobre à 10h45 dans la superbe salle Molière du Palais Bondy
 

La programmation

Une balle dans la tête de John Woo (Die xue jie tou, 1990, 2h11, int -16ans)
Pathé Bellecour di 19 15h

 

Catégories : Lecture zen