Karin Viard,

un talent monstre
 


Posté le 14.10.2023


 

Entre cinéma populaire et films d’auteur, sa carrière est une suite ininterrompue de choix judicieux et souvent surprenants.

 

Karin Viard OFFICIELLE C Arno Lam Pour Charlette Studio
© Arno Lam pour Charlette Studio

 

Cinq films rien que cette année. Mais aucun qui fasse dire qu’elle en fait trop. Elle est juste dans chacun, surprenante le plus souvent, drôle évidemment, mais pas que. Et chaque fois, le public l’a suivie, parce que Karin Viard ressemble aux gens qui s’enferment deux heures dans une salle pour découvrir une histoire qui fait écho à leurs vies.
Conseillère immobilière dans Wahou ! de Bruno Podalydès, accoucheuse dans Sage-homme de Jennifer Devoldère, ou épouse quittée dans Nouveau départ de Philippe Lefebvre, elle a le don de conférer à ses rôles une humanité singulière, en développant une totale liberté de jeu, sans doute parce qu’elle n’est pas « une actrice très mentale, plutôt assez émotion- nelle. Je cherche toujours le petit vibrato dans les rôles, quels qu'ils soient » expliquait-elle dans un récente interview à France Culture.

« Je travaille autour du texte, une scène après l'autre. J'essaie de m'imprégner et de comprendre un peu la pensée du personnage. Et puis concrètement, une fois qu'on a appris son texte parfaitement, qu'on l'a réfléchi et pensé, il faut arriver sur le tournage dans un état de disponibilité maximale qui vous rend hyper perméable à tout. » Cette liberté qu’elle revendique et défend est, raconte Karin Viard, « un truc lié à l’enfance. Dès que j’ai pu choisir ma vie, je me suis jurée qu’on ne m’imposerait plus rien ».

Si l’existence de Karin Viard devient un roman, le titre en sera tout trouvé : « La fille qui ne s’aimait pas ». A la séparation de ses parents, âgée de 5 ans, elle est confiée à ses grands-parents. Et aussi aimants qu’ils se montrent, la petite doit faire dès lors avec un méchant sentiment d’abandon. Un mal pour un bien estime-t-elle avec le recul, qui l’a affranchie de l’obligation de ressembler à ses modèles. « J’ai eu la liberté de pouvoir être qui j’étais. » L’envie de jouer la comédie la renvoie à ses 9 ans. Dans le salon de papy-mamie passe à la télé Notre-Dame de Paris et c’est un choc visuel et sensoriel puissant. Ce n’est pas Gina Lollobrigida alias Esmeralda qui la bouleverse. Plutôt Anthony Quinn en Quasimodo. Aussi laid qu’attachant. « Soudain, il me fait rêver, ce gars. C’est lui qui provoque l’émotion, c’est lui que je veux être », confie l’actrice encore exaltée en évoquant le monstre hugolien à qui elle doit sa vocation.


A quatorze ans, elle entre avec une dérogation au cours d’art dramatique de Rouen, où d’autres « morts de faim » (Franck Dubosc, Valérie Lemercier) vont poursuivre le même rêve qu’elle. A dix-sept, son bac avec mention en poche, direction Paris où elle se donne dix ans pour réussir. Mais personne ne l’attend, elle s’inscrit à des « cours nuls », se casse le nez aux castings et cumule les petits boulots pour remplir son frigo : vendeuse chez Burger King, démonstratrice aux Galeries, cobaye de laboratoire pharmaceutique, etc. Sept ans vont passer.


Jusqu’à ce qu’un agent débutant joigne son destin au sien. Il s’appelle Laurent Grégoire, « il n’est encore qu’un grouillot », bientôt deviendra le parrain de la profession. Les premiers vrais rôles tombent, dans Tatie Danielle et Delicatessen. Sa nature, sa faconde, ses rondeurs sexy font le reste, Karin Viard est là pour rester, dans des registres aux antipodes qui vont lui permettre de triompher dans la comédie pure - Les Randonneurs, 1997 - comme dans le drame intime : Haut les coeurs ! de Solveig Anspach lui vaut en 2000 le César de la meilleure actrice. Nommée déjà à treize reprises, deux autres statuettes sont venues depuis décorer ses étagères. Quasimodo serait fier d’elle.

 


Carlos Gomez


 

MASTER CLASS
Rencontre avec Karin Viard

Pathé Bellecour - Lundi 16 octobre à 15h


SÉANCES

Lulu femme nue de Sólveig Anspach (2013, 1h27)
Institut Lumière (Hangar)
Dimanche 15 octobre à 14h45
Cinéma ComœdiaLundi 16 octobre à 19h

Jalouse de David et Stéphane Foenkinos (2017, 1h47)
Pathé Bellecour
Lundi 16 octobre à 16h45

L'Origine du monde de Laurent Lafitte (2020, 1h38)
UGC Astoria - Dimanche 15 octobre à 20h

 

 

 

Catégories : Lecture zen