Konrad Wolf,

libre penseur du cinéma est-allemand
 


Posté le 12.10.2025


 

Il est rare que la vie d’un cinéaste soit aussi étonnante que ses films. C’est le cas de Konrad Wolf dont le destin incarne tout un pan du 20ème siècle. 

 

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© DEFA Stiftung Alexander Kuehn Wolfgang Bangemann
Konrad Wolf

 

Né en Allemagne en 1925, Konrad Wolf réalise une quinzaine de films entre 1955 et 1980. Fils d’une famille juive, communiste, il déménage à Moscou en 1933 pour fuir les nazis. Il revient dans son pays natal en 1945, en tant que très jeune soldat dans l’Armée rouge. Ce sera le sujet du son film autobiographique, J’avais 19 ans. Toute la vie de Wolf est celle d’une double identité : soviétique et est-allemande. À Moscou en 1949, il suit des études de cinéma. À Berlin Est, en RDA, dans les années 50, il devient le réalisateur d’une œuvre dont le grand sujet est l’Allemagne et sa complexité, ou comment les sentiments dont l’amour, la trahison et la mélancolie, mènent à des prises de conscience politiques magnifiques. C’est le cas de Lissy, petite employée face à la montée du nazisme dans les années 30. C’est Walter, soldat qui veut sauver des camps Ruth, jeune juive dans Étoiles, premier film allemand à traiter la Shoah, et prix du Jury à Cannes 1959. 

L’autre grande période de la vie de Wolf est celle de la vie au sein du bloc soviétique. Une utopie à laquelle le cinéaste voulait croire. Il filme son époque avec cependant un regard critique sur la société, et toujours bienveillant envers ses personnages féminins. Il suit avec poésie les pas de la jeune ouvrière qui espère en la vie à deux dans Le Ciel partagé. Il galope avec la petite chanteuse populaire qui ne se satisfait pas de l’existence en RDA, dans Solo Sunny réalisé avec Wolfgang Kohlhaase. Renate Krößner reçut pour ce rôle le prix d’interprétation au festival de Berlin en 1981. « Je n’ai jamais rencontré Konrad Wolf, dit Wim Wenders, Prix Lumière 2024, j’aurais adoré lui montrer un de mes films tourné dans cette même ville divisée, avec un titre très similaire, même si Les Ailes du désir suggérait un ciel unique, ou le paradis, un quart de siècle plus tard. Lorsque j’ai eu pour la première fois l’occasion de montrer un film à Berlin-Est, Paris, Texas, nous étions en 1984 et Konrad Wolf était mort depuis deux ans. À cette époque, j’avais vu Busch Sings et Solo Sunny, et je regrettais profondément d’avoir manqué une rencontre avec mon grand collègue est-allemand. Mais les occasions manquées sont l’histoire malheureuse de tant de relations entre Ouest- et Est-Allemands... »

Président de l’Académie des Arts de Berlin Est de 1965 à sa mort en 1982, Wolf enchaine les histoires très romanesques. Son cinéma est celui de l’émancipation des êtres, des paysages authentiques et documentaires. Découvrir Berlin Est, ville à laquelle le cinéaste est toujours resté fidèle, alors qu’il a voyagé à travers le monde, rend son œuvre si émouvante.

 

 

 

Virginie Apiou

 

La programmation

Lissy de Konrad Wolf (1957, 1h29)
Institut Lumière (Hangar) ma 14 9h15 | Institut Lumière (Villa) me 15 14h30Institut Lumière (Villa) ve 17 19h | Institut Lumière (Villa) ve 17 19h15

Étoiles de Konrad Wolf (Sterne, 1959, 1h32)
Institut Lumière (Hangar) me 15 9h

Le Ciel partagé de Konrad Wolf (Der Geteilte Himmel, 1964, 1h54)
Institut Lumière (Villa) lu 13 11h15 | Institut Lumière (Villa) lu 13 11h30

J'avais 19 ans de Konrad Wolf (Ich war neunzehn, 1968, 1h55)
Lumière Terreaux ve 17 10h45 | Institut Lumière (Villa) sa 18 14h15 | Institut Lumière (Villa) sa 18 14h30

Solo Sunny de Konrad Wolf et Wolfgang Kohlhaase (1980, 1h42)
Institut Lumière (Villa) je 16 11h15Institut Lumière (Villa) je 16 11h30 | Pathé Bellecour sa 18 21h30

 

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