Seijun Suzuki,

le petit génie oublié !
 


Posté le 12.10.2025


 

Oublié, le cinéaste japonais Seijun Suzuki l’a été. Pourtant son cinéma du divertissement socialement subversif, soit 50 films de 1956 à 2005, a impressionné Jim Jarmusch, Wong Kar-wai, Park Chan-wook, Quentin Tarantino, pour ne citer qu’eux. 

 

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© Nikkatsu / DR
Le Vagabond de Tokyo (1966)

 

Ses années en tant que réalisateur pour le studio Nikkatsu sont parmi les plus folles. Voyage au cœur d’un cinéma aventureux, où il ne faut jamais que le spectateur s’ennuie…

BIO EXPRESS
Né en 1923, après des études de cinéma, Seijun Suzuki intègre la Nikkatsu où il tourne parfois jusqu’à cinq films par an, des séries B réinventées, de 1956 à 1968. « Il y avait davantage de liberté que réaliser des séries A », dira-t-il. Son style très libéré finit par heurter la direction conservatrice de la Nikkatsu, notamment sur le film La Marque du tueur. Licencié, il entame une traversée du désert de dix ans avant de réaliser à nouveau notamment des animes. 

HISTOIRES
Portraits de femmes nues et perdues, dures à cuire, jalonnent l’œuvre de Suzuki, elles se battent dans un Japon vaincu par les USA, - La Barrière de chair -, ou sont en quête d’amour : « Quitte cette femme ou je te tue » dit l’héroïne trahie d’Histoire d'une prostituée, qui de désespoir veut « jeter son corps contre ceux de toutes sortes d’hommes », des soldats japonais brutaux. Il y a aussi la version moderne et japonaise de Carmen de Bizet, Carmen de Kawachi, avec Yumiko Nogawa, comédienne au visage provoquant qui tournera beaucoup avec Suzuki. 

Côté masculin, ce sont les yakuzas qui inspirent le cinéaste. Symbole de l’argent et du pouvoir avec Le Vagabond de Tokyo ou La Marque du tueur. « Des personnages plus intéressants que les gens normaux », dit-il, « qui cheminent entre la vie et la mort », et dont Suzuki moque la violence ridicule et sans but. À travers des scripts imposés mêlant frustration sexuelle et action brutale, Suzuki, qui hait l'idee de construire quoi que ce soit, bâtit malgré lui une œuvre forte, très reconnaissable. 

 

BARRIERE-DE-CHAIR© Nikkatsu / DR
La Barrière de la chair (1964)

 

STYLE
« Un film doit être fait à  la main, je n'aime pas beaucoup les nouvelles technologies », dit Suzuki qui multiplie les expériences visuelles qu'il préfère au scénario. Inventif, imaginatif et inspiré, entre humour absurde et nihilisme, ses héros se tirent dessus avec style. Ils évoluent sur fond de chansons de variétés dans des décors de studio dont Suzuki se sert avec un sens de l’artifice et du graphisme splendide. Ralentis intempestifs, saccades d’images, chorégraphie des tueurs entre eux, musique pop, blancheur des corps féminins, l’esprit Suzuki est onirique, érotique, dansant, profilé pour des sensations cinématographiques toniques, inattendues, exacerbées. 

 

 

Virginie Apiou

 

La programmation

La Barrière de chair de Seijun Suzuki (Nikutai no mon, 1964, 1h30, int -12ans)
UGC Confluence lu 13 21h15 | UGC Confluence ve 17 21h45 | Pathé Bellecour sa 18 16h15

Histoire d'une prostituée de Seijun Suzuki (Shunpu den, 1965, 1h36)
Institut Lumière (Villa) sa 18 19h45 Institut Lumière (Villa) sa 18 20h

Carmen de Kawachi de Seijun Suzuki (Kawachi Karumen, 1966, 1h29)
Institut Lumière (Hangar) ma 14 22h | Institut Lumière (Villa) di 19 16h15 | Institut Lumière (Villa) di 19 16h30

Le Vagabond de Tokyo de Seijun Suzuki (Tokyo nagaremono, 1966, 1h23)
Pathé Bellecour di 12 21h15 | Institut Lumière (Villa) ve 17 21h15 | Institut Lumière (Villa) ve 17 21h30

La Marque du tueur de Seijun Suzuki (Koroshi no rakuin, 1967, 1h32)
Institut Lumière (Hangar) lu 13 22h | Lumière Terreaux me 15 22h | UGC Confluence je 16 19h

 

 

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