Au-delà de l’oubli

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Fernando de Arellana (Hugo del Carril), un homme riche, voit sa jeune épouse Blanca (Laura Hidalgo) mourir prématurément. Inconsolable, il traverse une longue dépression. Au cours d’un voyage en France, il fait la rencontre de Mónica (Laura Hidalgo) : elle est le parfait sosie de la défunte, mais possède un caractère tout à fait différent. Fernando se marie avec elle, croyant pouvoir retrouver la femme qu’il aimait.

 © ArgentinaSonoFilm

Né en 1912 à Buenos Aires, Hugo del Carril brille d’abord comme chanteur de tango. Sa voix et sa prestance le poussent vers le cinéma, et il entame à la fin des années 30 une carrière d’acteur, enchaînant des films populaires qui font de lui une vedette en Argentine. Il se lance dans la mise en scène en 1949 avec Historia del 900 dont il signe également le scénario. Développant une fibre sociale affirmée, il se fait connaître hors de son pays avec Le Fleuve de sang (1952), son quatrième long métrage, qui concourt à la Mostra de Venise et aborde de façon puissante l’exploitation des travailleurs agricoles dans les plantations d’herbe à maté au XIX^e siècle.

Le sixième film d’Hugo del Carril, Au-delà de l’oubli, trouve son origine dans le roman Bruges-la-Morte de l’auteur belge Georges Rodenbach, dans lequel un homme dévasté cherche à faire revivre son épouse disparue. Le tournage, qui démarre en août 1955, s’interrompt le mois suivant lorsqu’un coup d’État renverse le président Juan Perón. Fidèle péroniste, Hugo del Carril est alors emprisonné durant plusieurs semaines, avant d’être relâché faute de charge retenue contre lui. Il achève le film dans la foulée. S’il ne rencontre qu’un succès modeste à l'époque, Au-delà de l’oubli gagne en prestige au fil des années, et s’impose aujourd’hui comme un classique du cinéma argentin. De nombreux critiques ont relevé dans le film des échos de Rebecca d’Alfred Hitchcock (1940). Mais de manière plus troublante, Au-delà de l’oubli semble aussi préfigurer une autre œuvre majeure du maître britannique, Sueurs froides (1958), avec son héros obsédé par l’image d’une femme, qui se dédouble sous les traits d’une même actrice.

« Hugo del Carril interprète lui-même le mari emporté par sa fascination face à la vedette Laura Hidalgo, dont n’existe plus qu’un grand portrait, qui rappelle Laura d’Otto Preminger. On pense parfois aux calligraphes italiens devant le splendide style d’Hugo del Carril, tout en mouvements d’appareil à l’exécution parfaite. » (Hubert Niogret, Positif n°773-774, juillet 2025)