Camarades

Les invités du festival - Marin Karmitz : cinéaste, producteur, collectionneur

Yan (Jean-Paul Giquel), 22 ans, vit à Saint-Nazaire. Sans emploi ni qualification, il cherche sa voie tandis que sa fiancée Juliette (Juliet Berto), vendeuse dans une boutique de mode, rêve d’une existence paisible. Sur les conseils d’un ami d’enfance, Yan monte à Paris et accepte un travail à la chaîne à l’usine. Face à la dureté du métier, Yan découvre l’activisme politique. 

 © DR MK2

Marin Karmitz naît en 1938 à Bucarest. En 1947, sa famille quitte la Roumanie pour s’installer en France. À la sortie du lycée, il entre à l’IDHEC et obtient son diplôme d’opérateur. Il travaille d’abord comme assistant réalisateur, notamment sur Cléo de 5 à 7 d’Agnès Varda, puis signe des courts métrages dont Nuit noire, Calcultta d’après Marguerite Duraset Comédie d’après Samuel Beckett. Son premier long, Sept jours ailleurs, est sélectionné à la Mostra de Venise en 1968 mais il choisit de le retirer de la compétition, participant à la contestation qui s’élève de toutes parts.

Le choc de mai 1968 conduit Karmitz, qui a fondé MK2 Productions, à repenser sa vision du cinéma. Il souhaite tourner des films engagés dans le réel, capables de susciter chez les spectateurs une prise de conscience de la lutte des classes. Tandis que Jean-Luc Godard s’oriente à ce moment-là vers des recherches formelles radicales, Karmitz veut s’adresser au grand public. Il s’inscrit dans un cadre narratif classique pour mieux diffuser un discours critique, basé sur le vécu des travailleurs.     

Afin de préparer Camarades, Karmitz interroge de jeunes ouvriers, recueille leur parole et les invite à collaborer à l’écriture du script. Jean-Paul Giquel, régleur sur machine licencié par Citroën, puise dans sa propre expérience pour donner plus de justesse à l’histoire, et Karmitz lui propose de tenir le rôle principal. Narrant le basculement d’une révolte individuelle à une action groupée, Camarades se révèle lui-même le fruit d’une réflexion collective. « Quand on a tourné à Saint-Nazaire, on a discuté avant, très longuement, avec les jeunes ouvriers qu’on avait rencontrés là-bas. On a même des interviews filmées de certains ouvriers dont le film retrace absolument la situation. Le film est entièrement fait sous le contrôle de jeunes ouvriers. » (Marin Karmitz, Jeune cinéma n°47, mai 1970)