Je suis le seigneur du château

Invitée d'honneur 2025 : Dominique Blanc

Thomas (Régis Arpin), un petit garçon de 10 ans, assiste seul à la mort de sa mère. Son père, Jean Bréaud (Jean Rochefort), décide d’engager pour les vacances une gouvernante, Madame Vernet (Dominique Blanc), qui a un fils, Charles (David Béhar), du même âge que Thomas. La guerre d’Indochine a séparé Madame Vernet de son mari, porté disparu. Par une belle après-midi d’été, Madame Vernet et Charles arrivent au château…

Après avoir été assistant auprès de Francis Girod, Claude Chabrol ou Volker Schlöndorff, Régis Wargnier réalise en 1986 son premier film, La Femme de ma vie, et offre à Dominique Blanc son premier rôle dans un long métrage. Il lui promet un nouveau personnage, « une très belle femme », bientôt. Trois ans plus tard, il lui offre le rôle de Madame Vernet dans Je suis le seigneur du château, un rôle écrit pour elle. Le scénario est librement adapté d’un des romans les plus célèbres de la romancière britannique Susan Hill, lauréate du Prix Somerset-Maugham en 1971. L’action est déplacée des années 70 aux années 50, afin de se nourrir de l’enfance des scénaristes.

Je suis le seigneur du château est un huis clos étouffant, un film où la cruauté enfantine, pas moins féroce que celle des adultes, répand partout son venin. Wargnier dissèque les relations des enfants avec leur parent, un amour si entier qu’il en devient possessif. Tapi dans une tour de son château, Thomas observe l’arrivée des intrus, Madame Vernet et Charles. S’étant donné comme mission de veiller sur son père, il règne sur la demeure et son parc, et tout élément extérieur est un danger potentiel à éliminer. Ici la menace est d’autant plus sourde que les ennemis sont sympathiques et que les solitudes de Monsieur Bréaud et Madame Vernet se rencontrent. Thomas n’a qu’un souhait : mettre son rival Charles à genoux, l’humilier, faire de sa vie un enfer quotidien, et faire licencier sa mère.

Tourné en Bretagne dont les forêts portent encore les stigmates de l’ouragan d’octobre 1987, Je suis le seigneur du château est porté par un certain lyrisme, qui l’emmène aux confins du cinéma fantastique. Mouvements de caméra, lumière sylvestre, musique de Prokofiev : la mise en scène est audacieuse. Une partie de la critique n’adhérera pas. Pour Dominique Blanc, au contraire, c’est « le plus beau film qu’ait fait [Régis Wargnier] à ce jour, le plus insolite, le plus original, et qui n’a pas vieilli. » (Positif n°576, février 2009)