Kalamita

Lumière Classics & Nouvelles restaurations : Trésors et curiosités

Honza (Bolek Polívka), étudiant, quitte l’université : il veut devenir machiniste dans les chemins de fer. Pour lui, la meilleure formation est l’apprentissage sur le terrain auprès des anciens et non étudier la théorie dans les livres. Son père, qui a passé sa vie au restaurant de la gare, est désemparé. 

© Vera Chytilová - Narodni filmovy archiv, Prague

Figure majeure du cinéma tchèque, Vera Chytilová (1929-2014) commence sa carrière au sein du studio Barrandov en tant que clapwoman, scripte, puis assistante réalisateur. Pour devenir cinéaste, elle décide de se former au sein de la célèbre FAMU, école de cinéma de Prague. Lorsqu’elle y entre en 1957, elle est la seule femme de la section réalisation. Après des courts métrages et un premier long, elle se fait connaître en 1965 avec le film collectif Les Petites Perles au fond de l’eau, film manifeste de la Nouvelle Vague tchèque, et est révélée avec Les Petites Marguerites un an plus tard. Elle devient la figure féminine du mouvement, mais refuse la catégorisation de son œuvre, qu’elle désire universelle. Mélangeant parfois fiction et documentaire, adepte des collages, elle signe des films aux accents de cinéma-vérité. Ses tonalités anarchistes (parfois considérées comme nihilistes) lui valent une surveillance de la censure. Pour autant, après l’écrasement du Printemps de Prague et l’ouverture de la période de « normalisation », contrairement à certains de ses pairs, elle décide de ne pas s’exiler. 

Après plusieurs interruptions forcées de travail, Vera Chytilová réalise Kalamita. Avec un humour acerbe, le film suit le parcours de Honza (incarné par le comédien et clown Bolek Polívka), qui parallèlement à son apprentissage professionnel, confronte ses idéaux romantiques à la réalité des convoitises et ardeurs féminines. Dans une atmosphère hivernale, le film se concentre sur la vie ordinaire, et souligne les dysfonctionnements du régime et les échecs de la bureaucratie. 

Vif, ironique, laissant une large part à l’improvisation des comédiens, Kalamita est une satire caustique sur l’amour, le sexe et le statut social. Sous des atours de comédie romantique inoffensive, le film sort en salles, et le public se presse pour le voir. Mais très rapidement, il est interdit de projection dans les cinémas de Prague, et ne sera pas distribué hors du pays.