La Dentellière

Prix Lumière : Isabelle Huppert

Béatrice (Isabelle Huppert), surnommée Pomme, est apprentie dans un salon de coiffure parisien. Discrète, gracieuse et silencieuse, Pomme, indifférente aux papotages, ne dérange personne. Marylène (Florence Giorgetti), provocante coiffeuse en quête de l’amour, la prend sous son aile. Lors d’un voyage des deux amies à Cabourg, Pomme rencontre François (Yves Beneyton), étudiant cultivé et terriblement timide. De retour à Paris, elle s’installe avec lui, dans sa chambre d’étudiant.

Adapté du roman de Pascal Lainé, lauréat du Goncourt 1974, La Dentellière s’inscrit pleinement dans l’œuvre de Claude Goretta, débutée dans la veine sociale avec ses documentaires et reportages consacrés à des personnages simples, filmés dans leur quotidien.

Histoire d’une rencontre de deux êtres ordinaires et solitaires, le film raconte un amour sans avenir. Pomme et François viennent de milieux différents : si leur timidité commune les rapproche, le langage les éloigne. Sensible, elle est naturellement silencieuse, ne fait pas d’histoire, quand lui, cultivé, verbalise ses émotions. Pomme manque de mots pour vivre dans le monde, pour dire qui elle est et ce qu’elle ressent. Face à ce mutisme, François part. La fêlure sera définitive pour Pomme, une souffrance vécue sans protestation.

La Dentellière est un film d’une grande délicatesse sur les barrières sociales, la solitude des êtres, mais aussi une réflexion sur le couple. Il est certainement le premier grand rôle d’Isabelle Huppert au cinéma. Pour Claude Goretta, qui l’avait vue dans plusieurs rôles auparavant, elle est alors une jeune comédienne puissante, capable d’interpréter des passages à vide intenses, mais est également une femme mystérieuse, qui a sans doute le besoin de parfois rester "en dehors".

« Rarement un film aura été plus marqué par la rencontre d'une comédienne et d'un personnage. Frileuse, lumineuse, exprimant magistralement ses sentiments d'un frémissement des lèvres, Isabelle Huppert s'est littéralement approprié le déchirant itinéraire de la dentellière blessée. Des yeux calmes comme un lac trop tranquille dans le cadre survolté d'un Cabourg en période estivale, elle arbore la grâce et la majesté d'une figure de Vermeer de Delft, peintre de la vie au ralenti, de la délicatesse et de la discrétion. » (Jean-Luc Douin, Télérama, 2 juin 1977)