La Famille Homolka

Lumière Classics & Nouvelles restaurations

Au sein de la famille Homolka, trois générations cohabitent – un couple, leurs deux enfants et les grands-parents. Par un beau dimanche d’août, après un pique-nique à la campagne qui tourne court, tous regagnent leur appartement commun à Prague. Mais la télévision est cassée. De quoi exacerber les tensions…

Jaroslav Papousek (1929 – 1995) est l’une des figures de la Nouvelle Vague du cinéma tchécoslovaque, qui dans les années 60 se distingue par sa tonalité mordante et fait souffler un vent de fraîcheur sur le pays, en proposant des films qui tranchent avec l’académisme des productions officielles du régime communiste. En tant que scénariste, Jaroslav Papousek a collaboré avec Milos Forman sur L’As de pique (1964) et Au feu, les pompiers (1967), ainsi qu’avec Ivan Passer sur Éclairage intime (1965). Il passe à la mise en scène en 1968 avec Le Plus Bel Âge, ayant pour cadre l’Académie des Beaux-Arts, dont le cinéaste est lui-même sorti diplômé.

La Famille Homolka est une comédie satirique épinglant les travers d’une famille praguoise ordinaire, qui tente de profiter de son temps libre sans parvenir à oublier ses dissensions. Le film s’ouvre dans un cadre bucolique : un jeune couple batifole dans les bois, avant d’être dérangé par l’irruption du clan Homolka, qui prend bruyamment ses quartiers d’été. Au départ tout semble promettre une journée idyllique. Les grands-parents se reposent, les jumeaux Péta et Máta (incarnés par les fils de Milos Forman) jouent dans l’eau tandis que leur mère Hedus, qui rêvait d’être ballerine, improvise une danse sous les arbres. Leur quiétude est rompue lorsque résonnent au loin des appels au secours, qui les poussent à la fuite. Le voile du bonheur se déchire et le récit se replie alors dans un logement exigu, où la promiscuité va mettre à nu bassesses et mesquineries. Avec la patte d’un caricaturiste, Jaroslav Papousek croque les faiblesses de ses contemporains, s’amuse de leurs petites lâchetés et utilise le registre de la farce pour dépeindre une société en panne d’horizon, qui tourne sévèrement en rond.        

« Sous prétexte de chroniquer un dimanche du mois d’août, contrarié par de cocasses contretemps, l’auteur ne décrit rien de moins que l’impuissance du mâle tchèque frustré dans ses désirs, l’insatisfaction conjugale engendrée par l’insuffisance dudit mâle, la toxicité des relations intimes ou encore l’incroyable égoïsme d’une population avide de biens matériels. Loin d’une interdiction, alors que tout exsude l’anathème contre un système pathogène hystérisant ses citoyens, l’œuvre est devenue culte dès 1969, et a suscité deux suites. » (Baptiste Roux, Positif n°745, mars 2023)