Sur un pont de Paris la nuit, Adèle (Vanessa Paradis), rongée par la tristesse, songe à se jeter dans la Seine lorsque Gabor (Daniel Auteuil) l’interpelle : « Vous avez l’air d’une fille qui va faire une connerie ». Adèle saute malgré tout. Gabor plonge et la sauve. Il est lanceur de couteaux et propose à la jeune femme de l’engager comme cible durant ses numéros.
La Fille sur le pont s’ouvre par une séquence étonnante : face caméra, dans le décor neutre d’un plateau de télévision, Adèle s’épanche longuement sur les malheurs amoureux qu’elle a connus : « Faut croire qu’il y a des gens comme ça qui font aspirateur pour soulager un peu les autres. Je tombe jamais sur le bon numéro. » Sans pathos superflu, Vanessa Paradis trouve le ton juste pour donner forme à son personnage, qu’elle dote d’une nature fragile et attachante. Son monologue est un morceau de bravoure. Dans un entretien avec Pascal Chantier et Jean-Charles Lemeunier, l’actrice évoque la façon dont elle l’appréhendait : « Cette scène est écrite pour qu’un acteur ou une actrice fasse une performance, comme on dit. C’est l’occasion rêvée de montrer comment on passe de l’orage au soleil et d’en faire trois tonnes. C’était justement le piège où il ne fallait pas tomber. » (Patrice, Leconte et les autres, Séguier, 2001)
Cette ouverture introduit aussi le thème de la malchance, vécue comme une fatalité que seul un coup du sort pourrait venir renverser. La rencontre entre Adèle et Gabor va être cette étincelle. Leur association se révèle un duo gagnant, chacun ayant besoin de l’autre pour que l’alchimie opère. Patrice Leconte ne fait pas mystère de l’attirance qui naît entre ses deux héros et retarde volontairement l’expression de leur désir, qui se charge d’autant plus d’intensité. Chacune de leurs représentations est ainsi filmée comme un moment d’extase, la peur et le plaisir se mêlant quand les couteaux de Gabor viennent se planter tout près du corps d’Adèle, dans une métaphore sexuelle évidente. La chanson de Marianne Faithfull « Who Will Take My Dreams Away ? » nimbe ces moments d’une grâce suspendue. Avec son noir & blanc élégant, son atmosphère onirique et ses dialogues ciselés, La Fille sur le pont offre à ses interprètes un bel écrin où déployer leur charme et leur mélancolie. Vanessa Paradis trouve ici un rôle plein et troublant, tandis que Daniel Auteuil recevra le César du meilleur acteur en 2000 pour sa prestation.
La Fille sur le pont
France, 1999, 1h30, noir et blanc, format 2.39
Réalisation Patrice Leconte
Scénario Serge Frydman
Photo Jean-Marie Dreujou
Musique Benny Goodman,Noro Morales, Marianne Faithfull, Orchestra Secondo Casadei, Banda Ionico, Natacha Atlas…
Montage Joëlle Hache
Décors Ivan Maussion
Costumes Annie Périer
Production Christian Fechner, Les Films Christian Fechner, UGCF, France 2 Cinéma
Interprètes Daniel Auteuil (Gabor), Vanessa Paradis (Adèle), Demetre Georgalas (Takis), Isabelle Petit-Jacques (la mariée), Frédéric Pflüger (le contorsionniste), Catherine Lascault (Irène), Mireille Mossé (Miss Memory), Bertie Cortez (Kusak)
Sortie en France 31 mars 1999
Remerciements à Tamasa
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