La Légende de Musashi

Toshiro Mifune : de Akira Kurosawa à John Boorman

1600. Dans un Japon en proie à la guerre civile, le jeune Takezo (Toshiro Mifune) quitte son village pour combattre l'ennemi. Survivant d’une armée en déroute, il doit fuir et tombe entre les mains du moine bouddhiste Takuhan Soho (Kuroemon Onoe), qui veut prendre en charge son éducation. Retenu en captivité durant trois ans, Takezo s’initie à la voie de la sagesse et devient un véritable samouraï, sous le nom de Miyamoto Musashi.

La Légende de Musashi est le premier volet d’une trilogie consacrée au célèbre samouraï, figure historique et héros national au Japon. Musashi fut à la fois un maître du sabre et un philosophe, se retirant du monde à la fin de sa vie pour rédiger un texte majeur de la pensée zen, Le Traité des cinq roues. Sa vie tumultueuse a depuis inspiré de nombreux récits, à l’écrit comme à l’écran.

Cinéaste prolifique, spécialiste de films épiques, Hiroshi Inagaki adapte ici l’œuvre de l’auteur Eiji Yoshikawa, publiée dans un premier temps sous forme de feuilleton entre 1935 et 1939. Mêlant faits réels et romancés, biographie et aventure, cette fresque d’une ampleur inédite a grandement contribué à rendre populaire le personnage de Musashi auprès du public.

Avec ce projet ambitieux, d’emblée pensé en trois parties, le studio Toho souhaite marquer les esprits, offrir une saga picaresque et spectaculaire, pleine de rebondissements. Des moyens importants sont déployés pour retracer l’histoire de Musashi. Le choix du procédé Eastmancolor permet de magnifier les combats en leur donnant un éclat novateur, tandis que l’équipe de Godzilla (Ishiro Honda, 1954) se charge des trucages. Pour camper le rôle principal, la compagnie pense tout de suite à Toshiro Mifune, qui sort du tournage des Sept Samouraïs, maîtrise parfaitement les arts martiaux et prête son énergie furieuse à Musashi, livrant une performance d’une forte intensité physique. Il tournera au total vingt films avec Hiroshi Inagaki.

Récompensé par l’Oscar du meilleur film étranger en 1956, La Légende de Musashi « bénéficie d’une vraie mise en scène, à la fois raffinée et vigoureuse. Preuve administrée dès la première séquence, où l’on voit au gré d’une bataille perdue le tumulte, les douleurs, l’apocalypse, les misères de la guerre. » (Édouard Waintrop, Libération, 4 août 1993)