La Montagne sacrée

Les invités du festival - Alejandro Jodorowsky / Événements et célébrations : Nuit Alejandro Jodorowsky

Après une série de procès et de tribulations, un voleur à l’allure christique (Horacio Salinas) s’introduit dans une tour où un alchimiste (Alejandro Jodorowsky) le prend comme disciple. Le maître spirituel lui présente sept personnes, toutes riches et puissantes. Ensemble, ils entreprennent un pèlerinage vers la Montagne sacrée afin d’en déloger les dieux qui y demeurent et atteindre l’immortalité. 

Grâce à El Topo, Alejandro Jodorowsky dispose pour son nouveau film d’un budget plus conséquent, qui lui permet d’aller plus loin dans l’ambition. La Montagne sacrée est une œuvre difficile à résumer, tant elle abonde en visions poétiques, qui s’enchaînent comme autant de tableaux dantesques. Des soldats défilent en brandissant des lapins écorchés, des oiseaux sortent de la poitrine d’étudiants fusillés, des batraciens rejouent la conquête du Mexique, un vieil homme offre son œil de verre à une petite fille… Autant d’images saisissantes qui font du film une traversée hallucinée, demandant au spectateur un total abandon.

À travers son récit, Jodorowsky s’attaque frontalement aux valeurs d’une société matérialiste. Dans la première scène, énigmatique, deux femmes se font raser le crâne, sont dépouillées de tout artifice. Interprétant lui-même le rôle de l’alchimiste, Jodorowsky guide les autres personnages sur la voie d’un certain détachement, qui doit les conduire à trouver une foi intérieure. Suivant un chemin ascétique, ils vont petit à petit renoncer à leur individualité, abandonner leur ego, s’affranchir du sexe et de l’argent. Conforme à cette ligne directrice, le tournage du film est une aventure particulière, selon les mots du cinéaste : « Pour moi, ce fut une expérience mystique. C’est à dessein que je n’ai pas pris d’acteurs professionnels. J’ai voulu que ce soit la même expérience pour tous. Nous avons vécu huit mois ensemble, dans une grande maison, les femmes d’un côté, les hommes de l’autre. […] Pendant ces huit mois, nous avons vécu selon les exercices spirituels d’Ignace de Loyola. » (La Croix, 28 janvier 1974)

Film culte par excellence, tourné en Technicolor, La Montagne sacrée imprime durablement la rétine par ses décors excentriques, ses costumes délirants et son bestiaire impressionnant, animaux et humains partageant le cadre dans une ambiance de cirque survolté.