Le Vampire de Düsseldorf

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Au début des années 30 en Allemagne, la République de Weimar vit ses derniers instants, menacée par la montée du nazisme. À Düsseldorf, Peter Kurten (Robert Hossein) assassine des jeunes femmes et fait régner la panique dans la ville. Sous une apparence d’homme discret et convenable, il sort tous les soirs à la recherche de ses proies, mais tombe amoureux d’Anna (Marie-France Pisier), une chanteuse de cabaret.

Lorsqu’il se lance dans l’écriture du Vampire de Düsseldorf, Robert Hossein occupe un statut particulier. Célèbre metteur en scène de théâtre, comédien très sollicité, il s’apprête à connaître un triomphe au cinéma sous les traits du comte Joffrey de Peyrac dans Angélique, marquise des anges de Bernard Borderie (1964), dont le tournage vient de s’achever. Entamée en 1955, sa carrière de réalisateur lui attire cependant les foudres de la critique, qui se montre particulièrement dure à son égard.

Pour son dixième long métrage, Robert Hossein revisite une affaire qui a déjà fait couler beaucoup d’encre, celle du tueur en série allemand Peter Kurten, ayant commis au moins neuf meurtres entre février 1929 et mars 1930, avant d’être guillotiné l’année suivante. Le criminel a déjà inspiré Fritz Lang pour M le maudit (1931), chef-d’œuvre de l’expressionnisme que Robert Hossein reconnaît admirer mais qu’il ne souhaite pas décalquer. Le cinéaste français entend livrer une version réaliste de cette histoire macabre, qu’il commence par inscrire pleinement dans son époque. Avant le générique de début, des images d’archives commentées rappellent le contexte troublé qui constitue le cadre de l’intrigue : crise économique, chômage de masse, agitation sociale et ascension d’Adolf Hitler. Sans expliquer le comportement de Peter Kurten par le climat de violence qui s’empare du pays, Robert Hossein fait du tueur l’incarnation d’une période malsaine.

Le réalisateur tient lui-même le rôle du criminel, qui présente un double visage : modeste ouvrier le jour, il se transforme le soir en prédateur traquant ses victimes. Accordant une grande importance à sa tenue vestimentaire, il veille à toujours s’afficher sous un aspect irréprochable. Par son jeu contenu, laissant seulement apparaître de légers déséquilibres sous la surface, Robert Hossein donne à ressentir les pulsions qui agitent son personnage. Avec sa mise en scène élégante, Le Vampire de Düsseldorf surprend agréablement la presse, qui se montre plus chaleureuse qu’à l’accoutumée avec le cinéaste.

« Estimable, cet ouvrage, conçu loin du mélodrame et des rituelles horreurs, l’est dans toute la mesure où Robert Hossein fascine même ses détracteurs à force de sincérité, de lyrisme intérieur et de foi. Rien de ce qu’il entreprend ne répond à des intentions banales, à des calculs ordinaires. » (Louis Chauvet, Le Figaro, 9 avril 1965)