Le père du petit Mame, âgé de 6 ans, confie son fils, contre la volonté de sa mère, à un marabout qui enseigne au sein d’un « daara ». Dans cette école coranique, les élèves sont soumis à une instruction religieuse stricte. La vie y est difficile pour les enfants, qui sont contraints de mendier, de ramasser du bois, de cultiver le champ du maître. Mame s’enfuit et retourne chez lui.
Mahama Johnson Traoré, né en 1942 à Dakar, suit d’abord des études pour devenir ingénieur électronicien. Souhaitant devenir réalisateur, il s’inscrit à Paris au Conservatoire libre du cinéma français, puis se forme lors de stages à l’ORTF. À son retour au Sénégal, il devient l’un des principaux metteurs en scène de son pays, dans le sillage d’Ousmane Sembène. En 1968, il tourne Diankha-bi, moyen métrage construit autour des portraits croisés de trois jeunes femmes au carrefour entre la culture africaine et le mode de vie occidental. Son premier long métrage Diegue-bi (1970) connaît un grand succès, et il enchaîne avec Laambaye (1972), adaptation d’une pièce de Nicolas Gogol, qui s’attaque à la corruption. La même année, il signe Reou-Takh, dans lequel un Afro-Américain débarque à Dakar et constate que la réalité ne colle pas à ses fantasmes : sur place il découvre la misère, le chômage, les inégalités sociales. Subversif, le film est longtemps interdit par le gouvernement sénégalais.
Très engagé, Mahama Johnson Traoré traite dans ses œuvres de problèmes sociaux et politiques, dont il veut amener le public à prendre conscience. Dans Njangaan, il aborde le sujet des talibés, ces enfants séparés de leur famille et placés sous l’autorité de marabouts, qui exploitent leur force de travail et les obligent à rapporter de l’argent. À travers le parcours édifiant du jeune Mame, le réalisateur dénonce cette pratique trop répandue. Tout en précisant ses intentions, il décrit ainsi la situation qui gangrène son pays : « Les marabouts actuels disposent d’une main-d’œuvre gratuite et de moyens de persuasion plus forts que ceux des hommes politiques qui parlent à la radio ou dans les meetings. Ils sont les plus gros bourgeois du Sénégal contemporain. Je précise que je ne m’attaque pas à la religion en tant que telle mais à ceux qui la détournent de ses objectifs pour opprimer le peuple en les trompant. » (in Cinéastes d’Afrique noire, Guy Hennebelle et Catherine Ruelle, Jeune Cinéma / CinémAction, 1978)
Présenté à la Quinzaine des Réalisateurs au Festival de Cannes en 1975, Njangaan est un film audacieux, pointant avec vigueur un phénomène qui reste toujours d’actualité.
Njangaan
Sénégal, 1975, 1h27, couleurs, format 1.66
Réalisation Mahama Johnson Traoré
Scénario Chérif Adrame Seck
Photo Baïdy Sow
Montage Marcel Hanoun
Production Société Nationale de Cinématographie, Sunu Films
Interprètes Abou Camara, Fatim Diagne, Mody Gueye, Bassirou Kane, Mame N’diaye
Restauration par la Cinémathèque Afrique et l'Institut français.
Le film est labellisé Lumière Classics, qui récompense les plus belles restaurations de l’année.
Remerciements à Sunu Films Production
Film ayant reçu le label
En présence de Sidy Mahama Johnson Traoré (fils du cinéaste)
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