Public Enemies

Michael Mann : Prix Lumière 2025

Durant la Grande Dépression qui frappe les États-Unis dans les années 30, John Dillinger (Johnny Depp) est un braqueur de banques charismatique et redouté, qui nargue la police et séduit l’opinion publique. John Edgar Hoover (Billy Crudup), à la tête du FBI, le désigne comme l’ennemi public n°1. Il met son agent le plus chevronné, Melvin Purvis (Christian Bale), sur la piste du bandit.  

Michael Mann s’intéresse depuis longtemps aux figures du gangstérisme ayant défrayé la chronique de son pays. Au milieu des années 80, il écrit un scénario centré sur Alvin Karpis, célèbre hors-la-loi traqué sans relâche par le gouvernement américain et capturé en 1936. Le cinéaste ne donne cependant pas suite à ce script, qu’il juge insatisfaisant. L’idée d’un projet consacré à cette époque refait surface avec la parution en 2004 d’un essai minutieux du journaliste Bryan Burrough, qui raconte comment la vague de criminalité des années 30 a entraîné le développement du FBI. Michael Mann en acquiert les droits et se lance dans son adaptation. Comme dans Heat, il choisit de bâtir son intrigue autour d’un duel haletant entre un gangster et un policier, multipliant les effets de miroir entre John Dillinger et Melvin Purvis, qui se livrent à une impitoyable lutte à distance.

Public Enemies couvre une courte période, saisissant les derniers mois de la vie de John Dillinger, depuis l’évasion de ses complices qu’il organise en septembre 1933 jusqu’à sa mort sous les balles des forces de l’ordre, à la sortie d’un cinéma en juillet 1934. Une existence menée à tombeau ouvert, dont Michael Mann restitue l’énergie folle grâce à un montage nerveux. Le cinéaste met aussi en scène la romance du gangster avec Billie Frechette, jouée par Marion Cotillard, qui trouve ici son premier grand rôle américain après son Oscar de la meilleure actrice obtenu en 2008 pour La Môme (Olivier Dahan).

Thriller historique revisitant le destin de personnages mythiques, Public Enemies dépoussière le genre par son esthétique d’une grande modernité. Poussant encore d’un cran son exploration du numérique, Michael Mann collabore pour la cinquième fois avec le chef opérateur Dante Spinotti et compose avec lui des images d’une incroyable netteté, qui donnent au film une texture saisissante : « La caméra digitale me procurait la sensation d’être vivant en 1933, d’être contemporain de l’époque dans le film, de pouvoir quasiment toucher la goutte de pluie tombant sur cette voiture noire. Cette sensation d’extrême réalité est ce que je recherchais. Je ne voulais pas que le public voie mon film comme un truc rétro. Non, il fallait que le spectateur ait le sentiment de vivre dans cette histoire. » (Michael Mann, Les Inrockuptibles n°710, 7 juillet 2009)