Sicario

Invité d’honneur : Benicio Del Toro

Plaque tournante du trafic de drogues, la zone frontalière entre les États-Unis et le Mexique est une région où la criminalité fait des ravages. Jeune agente du FBI, Kate Macer (Emily Blunt) rejoint une unité d’élite chargée par le gouvernement de lutter contre les cartels. Au cours de cette mission clandestine, son idéalisme se heurte aux méthodes brutales utilisées par l’agent Matt Graver (Josh Brolin) et le mercenaire Alejandro (Benicio Del Toro).    

Après Jimmy P. (Psychothérapie d’un Indien des Plaines), Benicio Del Toro s’illustre dans des registres très différents, brillant aussi bien dans la superproduction Les Gardiens de la Galaxie que dans le film noir touffu de Paul Thomas Anderson Inherent Vice. Il tient aussi en 2014 le rôle du narcotrafiquant Pablo Escobar dans Paradise Lost d’Andrea Di Stefano. L’acteur retrouve donc un sujet familier lorsqu’il rejoint le casting de Sicario, réalisé par le Canadien Denis Villeneuve. « Cette fois je joue un homme qui a participé au trafic, en a souffert et aujourd’hui lutte contre lui. C’est une des meilleures façons d’appréhender la mondialisation et ses contradictions. C’est un sujet très politique, qui recoupe tout : l’économie, la défense, la société de consommation… » (Benicio Del Toro, Les Inrockuptibles, 27 mai 2015)

Denis Villeneuve plonge le spectateur dans un monde sans foi ni loi, où aucune morale n’a plus cours, faisant vaciller les repères de son héroïne, présentée comme un modèle d’intégrité. L’ouverture du film donne le ton : menant une opération dans une villa, Kate découvre des dizaines de corps en décomposition derrière les cloisons. Cette vision morbide est l’une des nombreuses scènes fortes de Sicario, qui place en permanence le public sous tension par ses morceaux de bravoure, tel cet embouteillage géant qui devient le théâtre d’un affrontement sanglant. Ce thriller âpre bénéficie de la photographie de Roger Deakins, chef opérateur attitré des frères Coen. Le succès est au rendez-vous et donne lieu à une suite, Sicario : La Guerre des cartels, dirigé cette fois par Stefano Sollima, dans lequel Benicio Del Toro et Josh Brolin reforment leur duo.

« Villeneuve sonde les mystères de la nature humaine, questionne la moralité des États, explore la frontière du bien et du mal sans jamais donner de réponse. Véritable puzzle émotionnel, Sicario est une œuvre forte, intense, fascinante par moments, au rythme soutenu et aux personnages denses et complexes. » (Gérard Camy, Jeune cinéma n°366-367, été 2015)