Solo Sunny

Konrad Wolf, splendeurs du cinéma est-allemand

Ingrid Sommer (Renate Krössner) a quitté son travail à l’usine pour devenir chanteuse. Elle se produit sous le nom de Sunny et sillonne l’Allemagne de l’Est avec son groupe de musiciens. Entre difficultés sentimentales et revers professionnels, Sunny rêve de gloire et voudrait s’émanciper pour chanter en solo.    

 © DEFA Stiftung / Dieter Lueck

Dans les années 70, Konrad Wolf élargit ses horizons thématiques et signe des films très différents. En 1971, sa fresque Goya explore les démêlés entre le grand peintre espagnol et l’Inquisition. En 1974, il réalise L’Homme nu sur le terrain de sport, qui chronique le quotidien d’un sculpteur. À partir de cette date, Konrad Wolf travaille sur tous ses projets avec le scénariste Wolfgang Kohlhaase. Tous deux reviennent au film de guerre en 1977 avec Maman, je suis vivant, qui s’inscrit dans le prolongement de J’avais 19 ans.

Le cinéaste se montre réceptif aux remarques de son public, qui aimerait le voir aborder des sujets plus contemporains. Solo Sunny vient répondre à cette attente en livrant le portrait émouvant d’une chanteuse en quête de liberté et de reconnaissance, qui trouve l’énergie pour avancer malgré des aspirations sans cesse déçues. Sunny est une héroïne attachante, qui tient à son indépendance et se débat avec les hommes qui l’entourent. Elle refuse les avances d’un chauffeur de taxi qui veut l’épouser, tombe amoureuse d’un intellectuel qui la trompe, puis se voit évincée de son groupe. Elle habite seule dans un appartement sous les toits du quartier de Prenzlauer Berg, et son mode de vie lui vaut l’hostilité de sa concierge et de ses voisins.

Konrad Wolf et son coréalisateur Wolfgang Kohlhaase trouvent le ton juste pour raconter son histoire, entre drame, comédie et analyse sociologique. La réussite de Solo Sunny doit aussi beaucoup à la performance intense de Renate Krössner, qui reçoit l’Ours d’argent de la meilleure actrice au Festival de Berlin. La mise en scène réserve de beaux numéros musicaux, composés par Günther Fischer et interprétés par la chanteuse Regine Dobberschütz, qui double la comédienne lors de ces scènes. Triomphant dans les salles en Allemagne de l’Est, Solo Sunny est le dernier long métrage de Konrad Wolf, qui meurt d’un cancer en 1982.     

« Le cinéaste soutient son personnage jusqu’au bout, à travers les crises, la tentative de suicide, l’échec du retour à l’usine (séquence très importante puisque l’auteur écarte la possibilité qu’a Sunny de reprendre goût à la vie en réintégrant le travail collectif), il soutient le parti pris scénaristique de suivre l’itinéraire d’un personnage généreux dans un monde qui l’est moins, et de réaliser un film peu édifiant. » (Serge Toubiana, Cahiers du cinéma n°311, mai 1980)