Stanley et Iris

Martin Ritt, un cinéaste engagé à Hollywood

Nouvelle-Angleterre. Iris (Jane Fonda) est employée dans une pâtisserie industrielle. Mère de deux enfants, elle a bien du mal à se remettre de la mort récente de son époux. Stanley (Robert De Niro) est cuisinier à la cantine de l’usine. Célibataire, il vit reclus avec son père. Il cache à tous qu’il ne sait ni lire ni écrire. Stanley a observé Iris à la cantine, sans jamais oser l’aborder, et c’est un hasard qui provoque leur rencontre. Iris découvre le secret de Stanley, qui quelques jours après avoir été licencié lui demande de lui apprendre à lire.

Dernier film de Martin Ritt, Stanley et Iris est tiré d’un roman de l’autrice britannique Pat Barker. Signant pour la huitième fois un scénario pour le cinéaste, Irving Ravetch et Harriet Frank Jr. prennent des libertés avec le texte original et inventent notamment le personnage de Stanley. À travers lui, Martin Ritt peut traiter le sujet souvent occulté de l’analphabétisme. Ce handicap fait de Stanley un inadapté, exclu des gestes les plus simples de la vie courante. Iris, femme courageuse et endurante, mais aussi blessée et seule, lui viendra en aide, alors qu’elle soutient déjà une famille à problèmes. Pas de triomphalisme dans cette Amérique du chômage et de la débrouille, mais un quotidien morose et sans joie. Un portrait juste de ceux qui sont restés en marge du rêve américain.

Avec ce film sobre à la mise en scène sans effets, Martin Ritt plaide pour une société solidaire. Et si ce mélodrame social ne convainc pas totalement le critique Pascal Pernod, il note cependant : « Jane Fonda et Robert De Niro apportent à leur rôle une épaisseur chaleureuse et sensible, le travail du chef opérateur Donald McAlpine baigne les extérieurs d’une lumière enveloppante et propice à la discrétion des sentiments, ses mouvements de caméra suivent les personnages avec la même affection contrôlée. Réputé à juste titre pour son rapport privilégié avec les comédiens, Martin Ritt se montre soucieux de leur construire un espace idéal et protecteur. » (Positif n°352, juin 1990)

Après ce rôle, Jane Fonda se retire du métier d’actrice pendant quinze ans. Épuisé à la fin du tournage, Martin Ritt retourne de son côté chez lui en Californie. Très affaibli par le diabète et des problèmes cardiaques, il n’a plus la forme suffisante pour envisager de nouveaux projets. Il meurt à Santa Monica le 8 décembre 1990, âgé de 76 ans, laissant derrière lui des amitiés durables, un engagement constant ainsi qu'une filmographie riche, humaniste et variée.