De passage dans la ville de Courtempierre, David Gray (Nicolas de Gunzburg) loue une chambre dans une auberge. Durant la nuit, un étrange vieillard (Maurice Schutz) lui remet un paquet, lui défendant de l’ouvrir avant sa mort…
En 1928, le cinéaste danois Carl Theodor Dreyer réalisait La Passion de Jeanne d’Arc, s’offrant un véritable succès pour son dernier film muet. Quatre ans plus tard, son nouveau film, Vampyr, est particulièrement attendu. Une attente comblée pour certains, mais le film est globalement un échec, des spectateurs demandant à être remboursés. Dreyer attendra dix ans avant de réaliser un nouveau film.
Pour son premier film parlant, mais très peu dialogué, Dreyer tourne en France et postsynchronise trois versions (allemande, française et anglaise) à Berlin. Son comédien principal, qui offre sa silhouette inquiète à David Gray, est le baron Nicolas de Gunzburg, fils d’un russe exilé à Paris rencontré lors d’un bal masqué. L’homme rêve de cinéma : il jouera et produira Vampyr, ce sera sa seule expérience.
« À chaque nouvelle vision de Vampyr, il faut mourir au monde de la terre pour naître à celui de la poésie. » (Jean Sémolué, Carl Th. Dreyer, le mystère du vrai, Cahiers du cinéma, 2005) Le secret est peut-être là. Il faut aussi oublier tout ce que l’on connaît des films d’horreur et de vampires. Dreyer, convaincu que la terreur vient de la suggestion, montre peu et filme l’invisible. Suite à une erreur technique, le cinéaste découvre avec les premiers rushes une image voilée. Lui qui ambitionnait de contraster fortement son noir & blanc décide finalement de nimber sa photo d’une atmosphère brumeuse. Vampyr est ainsi un cauchemar éveillé, une déambulation somnambulique et diaphane, un ballet hypnotisant de visages, de morts, de cercueils.
« Grande [est] la force d'envoûtement, l'emprise, qu'exerce [Vampyr] dès sa première image embuée, à demi-effacée, comme toutes celles qui vont suivre, dans un étouffant ralenti de cauchemar. Car c'est bien d'un cauchemar qu'il s'agit, au cours duquel les cercueils et leur contenu apparaissent et disparaissent avec facilité. On voudrait fuir ces visions atroces de cadavres squelettiques, de masques effrayants et ces histoires de morts vivants. Mais on ne le peut, comme fascinés par ces tableaux démoniaques, aux beautés singulières, à peine estompés par un halo photographique qui n'est pas le moindre attrait du film. Comme dans La Passion, une sorte de génie diabolique et mystique tout à la fois éclate dans ces images sourdes, oppressantes, comme le jus s'échappe d'un fruit trop mûr. » (Marcel Carné, Cinémagazine n° 10, octobre 1932)
Vampyr
Allemagne, France, 1932, 1h13, noir et blanc
Réalisation Carl Theodor Dreyer
Scénario Carl Theodor Dreyer, Christen Jul, d’après le recueil In a Glass Darkly de Sheridan Le Fanu
Photo Rudolph Maté
Direction artistique Hermann Warm
Musique Wolfgang Zeller
Montage Tonka Taldy
Production Nicolas de Gunzburg, Carl Theodor Dreyer, Tobis Melofilm
Interprètes Nicolas de Gunzburg sous le pseudonyme de Julian West (David Gray), Maurice Schutz (le châtelain), Rena Mandel (Gisèle), Sybille Schmitz (Léone), Albert Bras (le domestique), N. Babanini (la femme du domestique), Henriette Gérard (Marguerite Chopin), Jan Hieronimko (le docteur), Jane Mora (la sœur infirmière)
Sortie en Allemagne 6 mai 1932
Sortie en France 23 septembre 1932
Restauration au laboratoire l’Immagine Ritrovata, qui a fabriqué un DCP VOSTF spécialement pour le festival Lumière.
Remerciements au Danish Film Institute et à la Cineteca di Bologna
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